Comment protéger les plantations du gel

Techniques pour mettre les plantes à l’abri des variations de température

Lorsque l’on plante en pleine terre, il faut faire en sorte que ces plantations soient protégées des aléas climatiques lors de leur croissance. Le gel étant un des principaux dangers. Voici quelques moyens utilisés depuis des siècles par nos anciens pour protéger du gel et des variations de températures :

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Les Brise-vents

On doit bien se garder d’adosser les couches contre des bâtiments ou des murs trop élevés : car les vents du midi, en rabattant sur les plants, leur portent autant de préjudice que ceux du nord ou du nord-ouest, dont bien des gens croient qu’il suffit de les défendre. Un carré de murs de 1m80 de hauteur est bien suffisant pour mettre les plants à l’abri des agitations de l’atmosphère. A défaut de murs convenablement placés, on a recours aux brise-vents.

Les brise-vents se font avec de la grande paille de seigle, qu’on nomme pleyon, ou avec des roseaux de marais coupés et séchés dans l’été. Ils doivent avoir 1m50 à 1m80 de hauteur, avec de forts pieux de toise en toise pour les soutenir. On coince cette paille ou ces roseaux à l’épaisseur de 3-5 cm entre deux lattes, et de pied en pied on l’arrête avec un fil de fer ou de l’osier; le premier vaut mieux en ce qu’il dure autant que l’ouvrage, et que l’osier demande à être renouvelé tous les deux ans.

Il faut trois rangs de ces lattes : le premier à 15 ou 20 cm de terre, le second à 15 cm de l’extrémité, et le troisième dans le milieu des deux; ils durent une dizaine d’années quand ils sont faits de pieux de chêne ou de châtaignier brûlés par le pied et travaillés avec le fil de fer. On comprend que ces lattes doivent être clouées sur les pieux avec des clous de longueur suffisante pour percer en même temps les deux lattes ainsi que l’épaisseur de la paille, et entrer solidement dans les pieux. On pratique une ou deux portes dans les endroits les plus commodes, et on les revêt également de paille.

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Les Cloches

II y a plusieurs espèces de cloches: les cloches soufflées ou à la maraîchère, les cloches à facettes ou verrines, les cloches anglaises et les cloches de terre cuite.

Les cloches soufflées sont des vases de verre mince d’un assez grand diamètre, avec un bouton au sommet; elles ont a peu près la forme d’une cloche en métal, seulement elles sont plus écrasées. On s’en sert pour conserver la chaleur et accélérer la végétation des plantes qu’on élève sur couches; on les pose perpendiculairement au sol en été, et sur un plan incliné au midi, à 13 degrés, en automne et au printemps. Comme il est nécessaire de donner de temps en temps de l’air aux plantes qu’elles recouvrent, on a des espèces de fourchettes de bois pour les tenir élevées.

Les cloches de verre noir ou de verre de bouteille, sont celles qui communiquent le plus de chaleur aux plantes, en raison de leur couleur, qui absorbe mieux les rayons solaires. Celles de verre blanc les réfléchissent davantage, et sont par conséquent moins chaudes; mais les plantes qui en sont recouvertes sont plus vertes que les autres, parce qu’elles reçoivent plus de lumière.

Cloches à facettes. Les cloches des jardiniers ne sont pas toutes d’une seule pièce comme celles que nous venons de décrire; car ces cloches soufflées sont d’un prix assez élevé, et l’on éprouve une perte considérable lorsqu’elles sont frappées de la grêle. Pour éviter cet inconvénient, les vitriers en fabriquent avec un certain nombre de petits carreaux de vitre réunis par des traverses de plomb laminé. Le premier rang de verre, et quelquefois le second et le troisième, suivant la hauteur qu’on veut donner aux verrines, sont placés perpendiculairement, et forment la circonférence; l’avant-dernier rang est incliné, ou formé de carreaux à angles plus ou moins aigus, jusqu’au dernier, formé de vitres triangulaires dont les pointes se réunissent, et sont surmontées d’un anneau qui sert à transporter la cloche. Il y a à différentes distances de la base des pointes de fer pour fixer la cloche solidement en terre. L’entretien de ces cloches est moins dispendieux que celui des cloches soufflées : car on conçoit qu’un orage ne peut briser que quelques vitres, dont la réparation est facile et peu coûteuse. Les verrines sont préférées aux cloches soufflées dans le nord de la France.

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Les cloches anglaises sont des espèces de cloches soufflées. Leur forme est celle d’un dôme surmonté d’un rétrécissement de 3 à 5 cm de diamètre, de 3 à 8 cm de hauteur, percé en forme de cheminée qu’on bouche à volonté selon le besoin d’air. Leur longueur et leur largeur sont arbitraires. Elles sont d’un emploi très avantageux pour les boutures et les marcottes, dont elles facilitent la reprise d’une manière toute particulière.

On fait aussi des cloches de terre cuite qui sont très commodes, et n’induisent pas à une grande dépense. Leur forme est celle d’un cylindre coupé obliquement, et leur ouverture est couverte d’un carreau de vitre fixé à l’aide de mastic. Ces cloches sont très bonnes pour les boutures et les plantes qui ne rampent pas; mais si l’on veut que les plantes jouissent du soleil toute la journée, il faut tourner le verre du côté du levant le matin et du couchant le soir.

Quelques jardiniers se servent de cloches de paille pour garantir les jeunes plants de la trop grande ardeur du soleil, en les mettant sur les cloches de verre. Elles les garantissent de la fraîcheur de la nuit, et conservent plus longtemps les rayons condensés du soleil. Elles servent également seules, quand il ne s’agit que de procurer de l’ombre, particulièrement aux jeunes plants qu’on repique en pleine terre.

Les Châssis

Ce sont des cadres formés de planches verticales placées sur le sol qu’on a préparé pour en faire une couche, et recouverts de panneaux vitrés. Ces cadres ont 2, 4, et jusqu’à 8 mètres de longueur sur 1m20 pieds de largeur environ; ils doivent être transportables, et sous ce rapport les grands ne sont pas les plus avantageux. La direction qu’on leur donne doit être de l’est à l’ouest; les planches qui sont du côté du midi sont plus hautes que celles du côté opposé,de manière que les vitraux soient inclinés vers le sud, et reçoivent toute la force des rayons solaires, tandis que le mur opposé, plus élevé, garantit les plantes des vents du nord. Des poignées de fer attachées aux deux bouts du cadre servent à l’enlever pour le déposer sous des abris lorsque la saison le rend inutile ou que les plantes ont acquis assez de force pour ne plus craindre les variations atmosphériques.

Comme on est souvent obligé de donner de l’air sous les châssis et d’ouvrir les panneaux à différentes hauteurs, il est nécessaire d’établir des crémaillères tant sur le devant que sur le derrière. Les plus simples sont des planches de 4 cm d’épaisseur, de 1 mètre de long et de 10 cm de large, dans lesquelles on taille des crans. Cette espèce de crémaillère n’est point fixée au châssis; lorsqu’on veut donner de l’air, on la pose sur le bord supérieur de la caisse où elle est retenue au moyen d’une entaille pratiquée à sa partie inférieure; on la dresse, et l’on pose le cadre du panneau sur le cran qu’on a choisi pour l’ouverture du châssis.



Lorsque les châssis sont destinés aux semis, il est bon que le terre-plein de la couche ne soit pas éloigné de plus de 15 cm des vitres des panneaux. Un plus grand éloignement nuirait à la germination, et occasionerait l’étiolement des jeunes plantes qui lèveraient. En général, plus les plantes sont rapprochées des vitraux, pourvu toutefois qu’elles ne soient pas affaissées, mieux elles se conservent, et plus elles végètent avec force.

A la place des vitres, les Hollandais se servent de papier collé sur le cadre; mais, comme ce papier serait détrempé et ensuite dissous par la pluie, ils ont soin de l’imbiber de graisse, et de le rendre ainsi imperméable à l’eau. Voici leur procédé: Le papier collé sur son cadre, ils le présentent sur un réchaud garni de charbons allumés; lorsque le papier est bien chaud sans être roussi, ils passent légèrement par-dessus du saindoux que la chaleur du papier fait fondre. Ils renouvellent la même opération pour chaque carreau. Elle rend le papier plus diaphane; et la clarté sous le châssis, lorsque le soleil ne donne pas, est plus douce et plus forte que celle produite par la vitre.

La construction des châssis est assez dispendieuse, mais au total leur emploi est plus économique que celui des cloches : car une couche sous châssis peut recevoir deux fois autant de plantes et de semences qu’une couche couverte de cloches , objet important qui épargne la dépense entière d’une couche. D’un autre côté les châssis sont peu sujets aux fractures; les plantes ne s’y étiolent pas comme sous les cloches, parce qu’elles ont plus d’air et de liberté de s’étendre; les fruits y sont plus hâtifs, plus savoureux. Un pied de melon sous châssis rapporte trois ou quatre fruits, tous bien conditionnés, tandis que sous cloche l’expérience prouve que si on en laisse deux, le second nuit au premier. Enfin la couverture des châssis consomme trois fois moins de litière que celle des cloches, parce qu’il y a beaucoup moins de superficie à couvrir.

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La Paille Brulée

L’espèce de litière que les jardiniers nomment paille brûlée n’est autre chose que du fumier ordinaire sortant de dessous les chevaux, secoué grossièrement, qu’on laisse sécher un peu au soleil, et qu’on entasse ensuite. Elle est très bonne pour défendre les plants : car elle donne le moyen de les couvrir à proportion de la rigueur du temps, de manière qu’on en met quelquefois jusqu’à 60 cm par-dessus les cloches, quand les gelées sont fortes. C’est un fonds dont il faut nécessairement être pourvu.

Le Paillasson

Les paillassons ont sur la litière l’avantage de rejeter les eaux et de détourner l’humidité, qui est la principale cause de la ruine des plantes. Leur longueur se règle sur la largeur des couches; elle doit être telle qu’ils retombent de 30 cm de chaque côté sur les sentiers. La largeur est ordinairement de 1 à 1m50. Voici la manière la plus simple et la plus expéditive de les fabriquer. On commence par marquer ses longueurs et largeurs par terre, dans une grange ou tout autre local convenable, et l’on divise les traits de ficelle proportionnellement à la largeur; il en faut cinq, à savoir : un dans le milieu, deux à 15 cm des bords, et les deux autres dans le milieu des intervalles, de sorte qu’ils se trouvent à 20 cm de distance; on enfonce des chevilles de bois ou de fer aux cinq pinces marquées aux deux bouts de la longueur, et l’on y attache cinq morceaux de ficelle bien tendus d’une cheville à l’autre. On coupe ensuite cinq autres morceaux de la même ficelle, qui aient deux fois la même longueur, et on les tourne chacun séparément autour d’un morceau de bois de 10 cm de longueur, évidé à mi-bois, à un 2-3 cm près des deux bouts, de manière que les deux extrémités forment deux boutons qui empêchent la ficelle de glisser; ou approche en même temps la paille, qui doit être de seigle, bien secouée, et la plus longue possible.

Lorsque le tout est ainsi préparé, un ou deux hommes se mettent à genoux à un bout, et un autre fait des poignées de paille qu’il étend devant eux sur les ficelles tendues; ils les prennent l’une après l’autre, et les lient à ces ficelles avec celle de leur navette, et font en même temps une espèce de nœud coulant qui les arrête et les serre les unes contre les autres. A mesure que l’ouvrage avance, ils avancent de même. Arrivés an bout de leur longueur, ils nouent les deux ficelles ensemble, et détachent le paillasson qui se trouve fait avec des ciseaux à tondre, ils égalisent ensuite les bords, et coupent en même temps dans toute l’étendue les épis et bouts qui se trouvent volant ça et là.

La difficulté de l’ouvrage, c’est de serrer également les cinq nœuds coulants qu’on fait pour chaque poignée de paille, de sorte qu’on soit juste des deux côtés quand on arrive au bout. Une autre attention importante, c’est de faire les poignées de paille bien égales et médiocrement fortes; douze à quinze brins suffisent; le paillasson est trop lourd à manier, surtout quand il est mouillé, lorsqu’on en met davantage; ce nombre de brins se partage par la moitié, et se croise de manière que les épis se trouvent en dedans, et le pied aux deux extrémités, ce qui fait que le paillasson est à peu près égal partout.

Il y a plusieurs précautions à prendre pour la conservation des paillassons. Lorsqu’ils sont finis, il faut frotter tous les traits de ficelle des deux côtés avec du goudron préparé; cette matière empêche que l’eau ne les pénètre et ne les fasse pourrir. Autant de fois qu’on ôte les paillassons de dessus les couches, il faut les étendre debout le long d’un mur pour les faire sécher; il faut enfin les mettre à couvert, dès qu’on n’en a plus besoin, dans un endroit à l’abri des animaux rongeurs. Faits et soignés comme nous venons de le dire, ils peuvent durer trois ou quatre ans; négligés, ils ne vont pas à la seconde année.